Rencontre avec Les Détritivores

BeCarefood invite l’entreprise sociale Les Détritivores à participer à son forum aux Halles de Bacalan de Bordeaux. Qui est cet acteur local qui s’investit dans l’économie solidaire et circulaire ? Nous avons rencontré Lucie Ouvrard, Chef de Projet de l’organisation sociale.

La collecte des biodéchets
La collecte des biodéchets

BeCarefood : Pouvez-vous nous présenter l’activité de votre entreprise ?

Lucie Ouvrard : Les Détritivores est une organisation solidaire qui propose une solution de sensibilisation, de collecte et de valorisation des biodéchets. La particularité de notre entreprise est que nous traitons les déchets directement au cœur de la ville afin d’éviter les déplacements de camions trop importants entre le gisement de biodéchets et l’unité de traitement. Nous avons implanté des micro-plateformes de compostage dans les quartiers nous permettant d’avoir une solution à faible émission de carbone. Nous permettons ainsi aux entreprises de réduire le poids de leurs poubelles et la quantité de biodéchet incinérée. Il nous tient à cœur de démontrer que ce qui existe déjà en milieu rural est reproduisible en milieu urbain, et de composter les déchets au plus proche des habitants.

Notre entreprise est aussi fortement créatrice d’emplois puisque collecter les déchets demande beaucoup de personnel. Depuis 2015, nous avons créé sept emplois pour des personnes en grande difficulté sociale et professionnelle d’accès à l’emploi, notamment des travailleurs handicapés. Aujourd’hui 40% des membres de l’effectif de l’entreprise sont en situations de handicap.

BC : Qui est à l’origine du projet et quel est son parcours ?

LO : Le projet émane dans un premier temps de Darwin et en particulier de Jean Marc Gancille qui est le Directeur de la Transition Ecologique et gère aussi le restaurant « le Magasin Général ». Un restaurant qui fait 400 couverts par jour produit forcément beaucoup de déchets alimentaires sous diverses formes. L’exemple le plus typique est le brunch du dimanche avec un buffet à volonté qui génère beaucoup de restes donc beaucoup de déchets organiques. L’objectif de Jean-Marc Gancille a très rapidement été de trouver une solution pour que ces déchets ne partent pas à la poubelle ou à l’incinération, mais plutôt qu’ils soient transformés le plus proche possible.

Dans un premier temps il a construit une petite surface de compostage à proximité du Magasin Général pour pouvoir valoriser les biodéchets sur place. Petit à petit, cette démarche a intéressé d’autres restaurateurs puisque depuis le 1er janvier 2016 tout restaurant générant plus de dix tonnes de biodéchets par an, est dans l’obligation légale de mettre en place un tri à la source.

Pour pouvoir développer l’activité et la proposer à d’autres structures, il s’est ensuite associé au deuxième fondateur, Frédéric Petit, qui est directeur d’une entreprise adaptée qui fait aussi de la collecte de déchets de bureaux. C’était au départ un projet militant qui aujourd’hui répond véritablement à un besoin de la part des sociétés productrices de biodéchets en grande quantité.

BC : Combien d’entreprises font aujourd’hui appel aux Détritivores ?

LO : Aujourd’hui une quarantaine de sociétés font appel à nos services. Elles sont issues de la restauration collective publique, de la restauration privée, ou sont des entreprises productrices de biodéchets telles que les fleuristes ou les coiffeurs. Nous travaillons aussi avec une banque alimentaire et sur certains événements comme le Festival CLIMAX, le Reggae Sun Ska et le Marathon du Medoc. Ce sont des activités ponctuelles, mais il est important de le signaler car ces événements sont de gros producteurs de déchets organiques.

BC : Quelles sont vos ambitions pour Les Détritivores et concernant les bonnes pratiques environnementales ?

LO : Nous souhaiterions bien sûr qu’encore plus d’entreprises s’engagent dans la collecte de leurs biodéchets. Ça nous paraît aberrant aujourd’hui que de gros détenteurs de déchets organiques mettent tout dans une même poubelle sans pratiquer la collecte séparative. En 2025, la loi de la transition écologique imposera le tri des déchets alimentaires à tous les détenteurs de biodéchets, même les particuliers. Nous souhaitons devancer cette loi et développer notre activité auprès des ménages avec éventuellement un système de collecte en porte à porte sur le milieu périurbain ou alors de collectes en apports volontaires en milieu ultra urbain comme à Bordeaux centre.

Nous avons également comme projet de pouvoir mettre sur le marché le compost créé à partir des déchets organiques. Aujourd’hui nous avons réussi à en produire une grande quantité et nous souhaitons vraiment le commercialiser pour éviter que les particuliers en milieu urbain s’approvisionnent en engrais chimique. Nous avons comme objectif de collecter des déchets sur un territoire, de les valoriser sur place, et de redistribuer les fruits de notre travail sur ce même territoire.

Concernant les bonnes pratiques environnementales, il serait bien que tout le monde commence à trier ses déchets, professionnels comme particuliers. Aujourd’hui les collectivités proposent encore peu de solution, et les professionnels comme les ménages font souvent appel à nous ou à nos concurrents. Il existe en milieu urbain des bornes pour la collecte du verre, donc pourquoi pas créer des bornes à biodéchets qui soient collectées régulièrement par nos services.

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Propos recueillis par @leost_antoine

 

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